En bref: le gouvernement malaisien a vendu ses parts dans Proton (42,7%) à DRB-Hicom. Mais la loi locale prévoit une période de réflexion durant laquelle le nouveau propriétaire peut changer d'avis. Et pendant tout ce temps, les robinets sont fermés pour Lotus. "Et pour pouvoir réaliser nos projets de développement de la gamme, il nous faut de l'argent", explique Bahar dans son discours. "Sans cela, nos nouveaux modèles seront retardés."
La date de 2013 pour le premier nouveau modèle (l'Esprit, ndlr) est-elle encore tenable?
DB: "C'est encore possible. Nous faisons au mieux pour poursuivre le développement, mais c'est difficile. En ce moment, les budgets que nous recevons sont inférieurs à ce que nous espérions. Et c'est d'autant plus dommage qu'il n'y a aucune cause économique à cela. Les ventes se portent plutôt bien: nous avons déjà 400 commandes pour l'Exige et 300 pour l'Evora GT."
C'est bien sûr facile d'en discuter après, mais était-il sage de se relancer dans la compétition et d'investir dans de nouvelles installations?
DB: "La compétition ne nous coûte pas beaucoup d'argent. D'une part il s'agit de refaire parler de la marque, mais cela ne coûte pas d'argent. Et d'autre part, nous vendons aussi des voitures de course "client", ce qui nous met en équilibre. Nous utilisons notre circuit de test de l'aube au coucher du soleil. Si nous devions louer un circuit comme Snetterton pour faire la même chose, ça nous coûterait énormément d'argent."
Les évènements actuels ne sont donc qu'un petit problème temporaire?
DB: "Non, c'est un gros problème. Parce que depuis le début, j'ai dit que Lotus ne peut pas survivre par elle-même. Nous comptons 2.000 employés mais nous avons vendu l'an dernier 1.500 voitures. Par ailleurs, nos marges bénéficiaires sont trop minces sur un modèle comme l'Elise. C'est une voiture pas simple à produire, mais nous ne pouvons nous permettre de l'afficher à un tarif trop élevé. Et c'est pour cela que nous avons tant besoin des cinq nouveaux modèles, qui nous procureront des bénéfices plus confortables. Or 95% des budgets prévus étaient alloués à ces nouveaux modèles. Sauf qu'en ce moment, nous ne recevons pas ces budgets. Tout ce que nous pouvons faire, c'est laisser passer le temps et attendre de voir ce que le nouveau propriétaire voudra faire de Lotus."
Votre prédiction?
DB: "Je n'en ai vraiment pas la moindre idée. Mais ce serait vraiment dommage d'abandonner les projets après tout ce que nous avons déjà investi. Tout ce que j'espère, c'est que nous pourrons faire aboutir les deux modèles qui sont les plus avancés: l'Esprit et l'Elite. Il est encore possible de lancer l'Elite en 2014, un an après l'Esprit. Ce serait un péché que de ne pas en faire des produits rentables."
De combien de voitures avez-vous besoin pour être une entreprise rentable?
DB: "Il ne nous en faut pas des quantités folles. Avec 4.000 ventes par an, nous serions bien. C'est juste que nous devons absolument faire plus de marge sur ces ventes. Et c'est précisément le problème de Lotus depuis 15 ans: des marges trop faibles que pour prétendre à un sain équilibre. En fait, le résumé de tout mon plan pour Lotus est là: moins de voitures mais plus de marge. Vous voyez, c'est pas bien compliqué."
Vous semblez bien plus prudent aujourd'hui que vous ne l'étiez à Paris, où vous aviez dévoilé vos cinq nouveaux modèles.
DB: "Pas plus prudent, plus réaliste. La situation présente est très inconfortable et il convient de ne pas trop voir la vie en rose. Mais en même temps, mon plan est plus réaliste aujourd'hui qu'il y a deux ans et demi. La nouvelle Esprit est prête pour le développement sur route. Le moteur et la boîte de vitesse sont "dedans" et la voiture tourne déjà sur notre circuit. On pourrait la prendre telle quelle et la tester sur route. Ca va être une voiture de sport fantastique. Mais il nous faut de l'argent pour aller de l'avant, et c'est là la difficulté. On ne peut que croiser les doigts et attendre."