Vous ne trouvez pas que le débat sur la voiture électrique est bien trop crispé? Bien sûr ça se comprend, puisqu'il y a une planète à sauver dans l'histoire, après que nous ayons allègrement empoisonné les villes à coup de diesel. Mais ce débat sur l'électrique ne laissait aucune place au fun. Jusqu'à aujourd'hui.
Facteurs suisses
C'est depuis la Suisse que nous arrive dans un doux murmure le Kyburz eRod. Kyburz est l'entreprise de Martin Kyburz, dont l'activité principale est de produire des tricycles électriques pour les services postaux helvétiques. Mais la société tente aussi de se faire une place dans le domaine des quatre roues. Le Kyburz eRod a été lancé en 2016, et est aujourd'hui disponible en Belgique via l'importateur MBO. Ce dernier a mis un eRod à notre disposition durant quelques heures, pour une première prise de contact.
Quelques heures ont suffi, car l'autonomie du Kyburz eRod n'est pas exactement impressionnante. Pour maintenir le poids du véhicule sous contrôle – l'eRod pèse 600 bons kilos – le pack de batteries a dû rester modeste. Les batteries lithium-fer-phosphate présentent une puissance de 19,2 kWh, de quoi alimenter un moteur de 61 ch (45 kW). Le véhicule abat le 0-80 km/h en 4,9 secondes et sa vitesse de pointe est limitée à 120 km/h. On peut en avoir plus, puisque Kyburz propose une version Race annonçant 204 ch et 305 Nm. Nous le disions, l'autonomie est assez modeste – 130 km maximum – et les temps de charges sont longs: 6 à 10 heures sur une prise domestique.
En avant ou en arrière
Le Kyburz eRod, c'est un roadster pour le fun, à l'usage très limité, un peu à la manière d'une Caterham. Le port du casque n'est pas obligatoire, mais conseillé. Le châssis tubulaire est certes habillé de quelques panneaux de carrosserie, mais quiconque roulera dans une bonne grosse flaque comprendra vite leur caractère symbolique. L'utilisation est on ne peut plus simple. On enjambe les tubes, on se laisser tomber dans les baquets, et on boucle le harnais quatre points. On ne démarre pas la voiture, on la met en fonction, mais avec une clé classique. Pied sur le frein, on sélectionne ensuite la direction souhaitée: en avant, ou en arrière. Kyburz a opté pour un accélérateur à course très longue, ce qui permet de rouler "au pas" pour les démarrages et les manœuvres. Mais quand on enfonce cette pédale bien au fond, c'est un autre univers qui s'ouvre.
Le Kyburz eRod est pur: pas d'assistance de direction, pas d'ABS, ni d'ESP. Seul un différentiel à glissement limité est proposé en option. Mais avec un empattement très court – l'eRod mesure à peine 3 mètres de long pour 1,60 de large – et toute la puissance envoyée aux roues arrière, seules vos aptitudes au volant décideront du bon déroulement des choses. La toute première fois qu'on décide de cravacher la petite bête, c'est terrifiant. La première accélération jusqu'à 70 km/h dans l'eRod est impressionnante. La poussée n'est peut-être pas aussi démentielle qu'avec le "Ludicrous Mode" d'une Tesla, mais quand-même… L'eRod avance bien plus fort que le léger "wooosch" qu'il émet laisse penser. Dieu merci, ses pneus assurent un grip à la hauteur… jusqu'à ce que vous décidiez d'aller explorer les limites.
Glisse
Les roadsters à empattement court sont en général difficiles à contrôler à l'approche des limites. Heureusement, c'est en toute sécurité que nous avons pu les titiller, sur les terrains du VOC de Bruges, où Jeffrey Van Hooydonck proposera ses cours de drift DreamDrive, avec l'eRod. Deux choses sont particulièrement évidentes. Premièrement, l'eRod peut perdre bel et bien perdre sa belle adhérence, moyennant un bon coup de pied sur la pédale de droite. Grâce au couple délivré instantanément, il part vite en survirage. Mais le drift est difficile à maintenir, car le moteur électrique vient tout aussi vite à bout du couple disponible. Il faut donc garder le pied droit au plancher si on veut rester en glisse. A ne faire que dans un environnement sécurisé, évidemment.
Véhicule zéro émissions, le Kyburz eRod tient surtout toutes ses promesses de fun. Mais la facture est salée. 47.795€, c'est un tarif haut comme les Alpes pour un simple jouet. Cela dit, on peut l'acheter en kit à monter soi-même, et on économise alors 10.000€. Mais même… Pourtant, si on le voit comme un engin prouvant que vert et fun peuvent aller ensemble, on est forcé de s'incliner.